Aller au contenu

Vous étiez nombreux à participer au step 1 ... et nous avons parlé de ...

Mettre de la formation dans le travail ou du travail dans la formation

Aux prémices de l’AFEST

Christophe Parmentier – Président APAFEST

Step 1 : AFEST Step by Step – introduction du cycle le 14/01/21 – avec la participation de la DGEFP.

En ouverture du Cycle l’AFEST Step by Step organisé par l’APAFEST, nous avons voulu rapidement évoquer différentes approches permettant de mieux intégrer le travail dans la formation. Evidemment le survol proposé a déjà été fait et il est rapide, il s’agit juste de relever quelques jalons. Mais il permet de comprendre que de « mettre du travail dans la formation » comme l’a précisé Laurent Duclos DGEFP lors de cette rencontre inaugurale, pour que la formation se rapproche du travail, est une démarche qui fait sens bien avant que la législation de 2018 sur la FPC ne la reconnaisse comme une modalité de dispense de la formation au même titre que la FOAD.

Depuis la Loi de 71 voulue par J. Delors mettant la formation professionnelle comme un outil du dialogue social, les acteurs de cette formation professionnelle interrogent, échangent et dialoguent autour de ces approches. Au-delà du simple commerce de nouvelles offres de formation, cette réflexion donne du sens à notre action de bénévoles et militants de l’APAFEST. C’est ainsi que nous avons voulu démarrer ce cycle.

Nonobstant les revendications politiques ou syndicales, le travail est couramment entendu comme une façon de produire, incluant des efforts faits pour des résultats obtenus. Depuis que la monnaie existe, le travail est devenu une activité rémunérée. Dans le droit commun il s’agit d’une obligation exécutée sous les ordres et le contrôle d’un employeur en contrepartie d’un salaire.

Cette approche du travail a été instrumentée pour être optimisée. Les modes de production centrés sur l’OST (Organisation Scientifique du Travail), méthode de gestion et d’organisation du travail, créée au cours de la seconde révolution industrielle par F.W. Taylor notamment, ont consacré la gestion et le management de ce travail. En réaction, les critiques ont été nombreuses et virulentes. Retenons à titre d’exemple fort connu « les temps modernes » de Charlie Chaplin. Plus récemment, inspiré notamment du système de production de Toyota, le Lean Management a en partie pris le relais. Il s’agit encore d’une méthode de gestion et d’organisation du travail qui vise à optimiser les performances d’une entreprise et plus particulièrement la qualité et la rentabilité de sa production. A nouveau, les critiques sont fondées et virulentes. Lors d’accompagnements d’entreprises sur des problèmes de troubles musculosquelettiques ou de risques psychosociaux, les ARACT ont notamment rencontrées ce type d’organisations.

Et qui plus est, le cycle productif associé au travail est souvent construit dans une logique associant sur des temps de plus en plus raccourcis : travail et emploi, obsolescence des compétences et chômage, et, dans le meilleur des cas, formation puis reconversion.

Pour prendre un peu de distance et sortir de ces organisations productives laissant finalement peu de place à la réflexion de fond sur l’acquisition des compétences et la place de formation professionnelle, la philosophie notamment propose une approche complémentaire. Elle conduit à aborder le travail non plus comme une production mais comme une activité. En effet, pour certains philosophes, le travail est d’abord ce par quoi l’homme transforme ce qui l’entoure pour satisfaire ses besoins. La notion s’écarte donc assez vite du sens courant envisagé précédemment : travailler, c’est alors agir sur le réel pour le modifier. C’est parce qu’on a des besoins (au sens de Maslow et au-delà) et parce que le réel résiste à leur satisfaction qu’il faudrait travailler. Par certain côté, l’homme serait donc contraint de travailler. Et dès lors, cette notion d’activité confer au travail une nouvelle valence sociale et personnelle de reconnaissance. Comme le montre par exemple C. Fleury, durant la pandémie que nous traversons actuellement, pour les salariés privés de travail, la plus grande souffrance est souvent celle d’une perte d’identité et d’un manque de lien social. Il convient alors d’explorer quelques fonctions moins directement productives du travail :

      1. L’ergothérapie se caractérise par l’éducation, la rééducation, la réadaptation ou encore la réhabilitation, par l’activité (ergon en grec). On retrouve l’approche du travail comme une activité. C’est par le biais d’activités de la vie quotidienne (soins personnels, travail et loisirs) et d’autres exercices globaux et analytiques que l’ergothérapeute organise une thérapie visant à améliorer des capacités d’agir et des compétences individuelles et collectives.
      2. Les ateliers protégés et les centres d’aide par le travail (CAT) ont été formellement été créés par la loi du 23 novembre 1957 sur le reclassement des travailleurs en situation de handicap. … Depuis 2005, les CAT sont devenus des établissements et services d’aide par le travail (ESAT). Ils ont progressivement occupé une place majeure dans la prise en charge et l’inclusion des personnes en situation de handicap.
      3. Depuis les années 1960, l’analyse de la relation emploi-formation a fait en France l’objet de nombreux travaux. Ils prennent notamment en compte de grandes enquêtes statistiques comme celles de l’INSEE ou du Céreq. Plusieurs mesures du lien formation-emploi ont été proposées. Toutes ces mesures montrent cependant que la relation formation-emploi est plurielle et que l’adéquation d’une formation à un emploi, à l’exception de quelques professions, n’est pas la norme sur le marché du travail. Régulièrement sur les bassins, les enquêtes des OREF le montrent encore.

 

Et pour aller au bout de cette réflexion préalable, un très rapide panorama de l’utilisation déjà faite du travail dans les modes d’acquisition des compétences s’impose :

      1. Pour certains (voir Ph. Carré), l’autodidaxie est un mode plein et entier d’acquisition des connaissances. Elle a fait ses preuves dans la reconnaissance de parcours individuels plus que comme système social promu.
      2. La formation sur le tas est légitimée par certains courants pédagogiques reconnus, comme par exemple : « Learning by doing » J Dewey. Il s’agit d’apprendre en pratiquant, sans préparation préalable. Souvent utilisée par les employeurs, cette approche est utilisée par exemple lors de l’intégration de nouveaux embauchés pour apprendre les ficelles du métier directement auprès de ses collègues.
      3. Le terme « compagnonnage » n’apparaît dans la langue française que vers 1719, pour désigner le temps de l’application professionnelle qu’un compagnon devait exécuter chez un maître. Mais les pratiques sont antérieures. Les légendes compagnonniques font référence à trois fondateurs légendaires du compagnonnage : Salomon, Maître Jacques et le père Soubise qui les mettent en scène à l’occasion de la construction du Temple de Salomon. Plus prosaïquement, en occident, le compagnonnage existait déjà à l’âge d’or des cathédrales. Des signes particuliers aux compagnons y sont reconnaissables. Anticipant sur l’alternance, le compagnonnage désigne un système traditionnel de transmission de connaissances et de formation à un métier, qui s’ancre sur le terrain auprès de communautés de pratiques. Un aspirant compagnon se forme à travers une série de pratiques éducatives encadrées par la communauté de compagnons qu’il souhaite intégrer.
      4. La loi du 10 juillet 1934 fut sans doute la première étape de construction d’un système de reconnaissance des acquis professionnels en offrant la possibilité à certains techniciens justifiant d’une expérience de plus de cinq ans dans leur domaine, d’obtenir le titre d’ingénieur diplômé par l’État. Cette première intégration dans la loi de la validation des acquis professionnels a été ensuite étendue ; 1985 et 1992 avec la VAP qui a d’abord eu du mal à entrer dans les pratiques. Elle a été relancée et élargie en 2002 avec l’apparition de la VAE qui s’additionne à la précédente qui subsiste :
          1. La validation des acquis professionnels (V.A.P. 85 – 92) permet d’accéder directement à une formation universitaire sans avoir le diplôme requis, en faisant valider une expérience professionnelle (salariée ou non), les formations suivies ou les acquis personnels développés hors de tout système de formation.
          2. La validation des acquis de l’expérience (V.A.E.) 2002 est l’une des voies d’accès aux certifications professionnelles avec la voie scolaire et universitaire, l’apprentissage et la formation professionnelle continue. La VAE permet, à toute personne engagée dans la vie active, d’obtenir une certification professionnelle par la validation de son expérience acquise dans le cadre d’une activité professionnelle et/ou extra-professionnelle. Vincent Merle en fut un artisan au CNAM.
      5. Entreprise apprenante : Né des travaux de Chris Argyris et de Peter Senge, le concept et la pratique de l’organisation apprenante se sont développés tout au long des années 90 et 2000. De nombreuses recherches et mode de management y font référence.

 

Le travail peut donc être une activité qui permet d’acquérir et de faire reconnaître des compétences reconnues à l’exercice d’un métier. Dès lors, sous l’impulsion de la DGEFP plusieurs expérimentations ont été organisées officiellement de fin 2015 jusqu’en juin 2018. Elles ont été compilées au niveau national. Elles ont touché 50 entreprises pour 70 personnes formées. Comme l’indique le rapport de synthèse de juillet 2018 (disponible sur le site de l’APAFEST), l’objectif de l’expérimentation « visait à poser une première brique, en caractérisant les contours et conditions de cette modalité de formation (la Formation en situation de travail) de sorte qu’elle soit reconnue par la réglementation comme une véritable action de formation … ». L’AFEST y trouve alors ses premiers contours opérationnels et législatifs. Ils ont été intronisés dans la loi de 2018.

En effet, la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » a introduit dans le code du travail une nouvelle définition de l’action de formation. L’article L.6313-2 stipule désormais que « l’action de formation se définit comme un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel. Elle peut être réalisée en tout ou partie à distance. Elle peut également être réalisée en situation de travail ». Cet article est complété par l’Article D6313-3-2 du code du travail :

La mise en œuvre d’une action de formation en situation de travail comprend :

      1. L’analyse de l’activité de travail pour, le cas échéant, l’adapter à des fins pédagogiques ;
      2. La désignation préalable d’un formateur pouvant exercer une fonction tutorale ;
      3. La mise en place de phases réflexives, distinctes des mises en situation de travail et destinées à utiliser à des fins pédagogiques les enseignements tirés de la situation de travail, qui permettent d’observer et d’analyser les écarts entre les attendus, les réalisations et les acquis de chaque mise en situation afin de consolider et d’expliciter les apprentissages ;
      4. Des évaluations spécifiques des acquis de la formation qui jalonnent ou concluent l’action.

 

Le cycle de formation ouvert aux adhérents et sympathisants : AFEST Step by Step s’appuie sur ces fondements. Mettre du travail dans la formation. Le cycle est déroulé à partir des 4 alinéas de l’article D6313-3-2 du code du travail. Ils permettront d’engager une réflexion et les échanges autour de 4 rencontres :

Nous souhaitons vous y voir nombreux. Que la FEST commence !

Soutenez-nous en adhérant à l'association